Le temps m’ayant manqué pour faire au premier tour de la primaire citoyenne la même chose que pour celle des écologistes et celle de la droite et du centre, je me rattrape pour le second tour. Y a-t-il, parmi les deux qualifiés pour le second tour, un candidat compatible avec le climato-réalisme ?
Évidemment la réponse est non. On peut toutefois (et même on doit) poser la question différemment : y en a-t-il un des deux qui soit le moins pire en la matière ? Là, la réponse est plus intéressante.
Un point méthodologique pour commencer : le commentaire qui suit s’appuie uniquement sur les programmes des deux candidats tel qu’ils sont présentés sur leur site de campagne (ici pour Benoît Hamon, là pour Manuel Valls), et non sur d’autres déclarations ou communiqués.
La grosse surprise vient de Benoît Hamon : le mot « climat » lui-même n’apparaît pas dans son projet :
Un essai avec « climatique » donne le même résultat :
En cherchant sur tout le site de campagne, ce n’est guère mieux : le mot « climat » apparaît deux fois, mais dans le contexte du « climat d’insécurité »… :
Avec « climatique » sur tout le site, enfin, quelques entrées apparaissent. On avait failli attendre.
Bref, vous l’avez compris, la question climatique ne semble pas être la priorité de celui arrivé en tête à la primaire.
Manuel Valls, en revanche, mentionne bel et bien le climat dans l’une de ses propositions, « répondre à l’urgence climatique », où il profite de l’occasion pour revenir sur le « succès » de la COP21 qui a eu lieu au moment où il était à Matignon (sans pourtant qu’on l’ait beaucoup vu à la manœuvre à l’époque).
Les deux finalistes de la primaire s’accordent sur une proposition : organiser une grand-messe écolo un Grenelle de l’environnement un grand événement national sur les questions environnementales, à la « grande conférence Écologie-Prévention-Santé » de Hamon faisant écho la « grande conférence environnementale » de Valls. Pouvoir monter sur une estrade entouré d’officiels, se congratuler, faire la morale, se donner des titres ronflants et des médailles semble décidément une marque de fabrique d’un certain écologisme contemporain à qui il fallait bien donner des gages. On imagine déjà Nicolas Hulot faire un exposé introductif sous les yeux des caméras tandis qu’applaudissent, au premier rang, des huiles à la tenue impeccable et au phrasé volontaire : Laurent Fabius, Ségolène Royal, Nathalie Kosciosko-Morizet (pour l’équilibre gauche/droite)… Les éditoriaux de tous les journaux, de Libération au Figaro en passant par le Journalderéférence saisiraient l’occasion pour « une fois de plus tirer le signal d’alarme », répéter « inlasssablement » que l’environnement en général et le climat en particulier « sont des sujets fondamentaux qui doivent dépasser les clivages partisans », puis finalement féliciter les organisateurs pour leurs « efforts face à l’inaction et aux lobbys »… le tout dans l’indifférence générale et entre deux débats sur la fuite de leurs lecteurs vers des médias alternatifs. Voilà sûrement ce qui nous attend à l’automne si l’un des deux est élu en mai.
Sur l’environnement en général et le climat en particulier, Valls fait clairement le minimum syndical, avec la « santé environnementale » Grande Cause nationale (il nous a déjà fait le coup avant la COP21), deux-trois annonces faciles et pas trop engageantes, et même une proposition franchement équivoque : « réunir les ministères de l’écologie, de l’industrie et de l’énergie dans un ministère unique« . C’est pour mieux te manger, mon enfant. Avec l’ancien premier ministre, on serait au moins sûr que les déclarations écologistes seraient d’autant plus enflammées que les actions seraient maigres. À mon sens c’est le mieux que peut faire un politique aujourd’hui en fait de climat : nourrir les militants de grandes phrases, puis passer aux choses plus sérieuses.
Le silence de Hamon sur le climat aurait pu constituer le même signe rassurant si le parfum qui se dégage de son projet n’en faisait pas un candidat de plus de la peur exponentielle. Les premiers mots de son projet disent déjà tout : « Notre course effrénée après la croissance n’a pas de sens dans un monde où les ressources naturelles sont finies (…) ». Je n’ai pas vu évoquer la crainte de la croissance démographique, mais en principe ça devrait finir par venir (il pourra prendre des conseils auprès de Nicolas Sarkozy…). Hamon est le candidat malthusien par excellence, soutenu de façon fort logique par Michèle Rivasi, la finaliste de la primaire écologiste (dont j’ai dit ici tout le bien que je pense). Le décroissancisme est peut-être en train de prendre la place du trotskysme dans le paysage politique français : insignifiant dans l’opinion, mais toujours présent à la présidentielle.
La présence du climat chez Valls et son absence chez Hamon sont donc en trompe-l’œil. Je les interprète ainsi : chez le premier elle est l’œuvre d’un politique aguerri qui se souvient des cases à cocher dans un projet électoral et veut s’approprier le succès médiatique de la COP21. Chez le second, les éléments de langage de l’écologisme malthusien sont l’œuvre d’un converti de fraîche date, qui ne maîtrise pas encore tous les codes du genre.
PS : Comme toujours s’agissant de cette série d’articles sur la présidentielle, qu’on ne lise pas ce qui précède comme un appel à voter pour ou contre tel ou tel sur la seule base de la question climatique.
« Notre course effrénée après la croissance n’a pas de sens dans un monde où les ressources naturelles sont finies »
On lui dit que même sans croissance, des ressources finies seront épuisées après un certain temps d’utilisation constante?
Qui lui explique qu’il faudrait une exponentielle DÉCROISSANTE pour se contenter d’un stock fini?
Question bonus : pour quoi enseigner les maths au delà du programme du primaire pour les non scientifiques? Quel prix pour quel résultat?
Question super-bonus : pour quoi enseigner la division? Est-ce que les gens savent à quoi sert une division? Pourquoi les articles de presse très souvent semblent écrits pas des gens qui ne pratiquent pas la division?
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