De quoi qu’on a (eu) l’air?

Par MD

1/ Introduction.
Voici le troisième et dernier article de cette série consacrée à la qualité de l’air en Ile-de-France au cours des sept premiers mois de l’année 2020. Cette période a été marquée pendant huit semaines par une interruption quasi-totale des déplacements, connue sous le nom de « confinement ». Cette expérience en vraie grandeur est unique dans l’histoire récente : il faut remonter à l’Occupation pour trouver des photos d’une avenue des Champs-Elysées pratiquement déserte. Les précédents articles du 23 avril et du 16 juin comportaient les informations et les commentaires utiles à la compréhension des graphiques : on ne les reprendra pas ici. Les graphiques ont été mis à jour selon les bases de données d’Airparif.

2/ Séries temporelles de concentrations journalières de polluants.
Les graphiques ont été établis pour la période du lundi 6 janvier au dimanche 26 juillet 2020 inclus, soit 10 semaines avant le confinement, 8 semaines de confinement et 11 semaines après. On a distingué les trois types traditionnels de stations de mesure : « trafic » en bordures de voies ou d’autoroutes urbaines, « fond » au sein de l’agglomération parisienne (Paris et banlieues), « rural » en zones non urbanisées. Les concentrations journalières sont les moyennes des concentrations horaires sur les 24 heures, exprimées en microgrammes par mètre cube.
Particules PM10 et PM 2,5.image001image002Dioxyde d’azote NO2.image003Ozone O3 (pas de station trafic).image004Stations de fond pour les trois polluants. Les stations de fond sont représentatives des zones où demeurent et travaillent les Franciliens.image005

3/ Indice Citeair.
Sur ce graphique, la couleur caractérise le polluant dont le sous-indice a déterminé l’indice global, égal par définition au sous-indice le plus défavorable des trois polluants réglementés. Le sous-indice d’ozone (en bleu) a généralement été déterminant pendant et après le confinement. Rappelons que l’échelle des indices est conventionnelle et ne doit pas être confondue avec les concentrations exprimées en microgrammes/m3.image006

4/ Récapitulation.
Ce tableau récapitule les concentrations moyennes observées pendant trois périodes caractéristiques de l’année 2020 : du 6 janvier au 16 mars ; du 17 mars au 10 mai (confinement) ; du 11 mai au 26 juillet (retour à la normale). Il est particulièrement intéressant, puisqu’il retrace l’exposition moyenne des Franciliens aux polluants présents dans l’air extérieur, ceci pendant des durées significatives. On voit qu’à la seule exception du NO2 aux stations trafic et dans une moindre mesure aux stations de fond, la période de confinement a connu les concentrations moyennes les plus élevées, ce qui est visuellement apparent sur les graphiques. Il en va de même pour l’indice moyen Citeair, quoique la pollution soit restée la plupart du temps dans la zone qualifiée « faible ».image007

5/ Météorologie.
Conditions météorologiques relevées par Météo France pendant la période.image008Les trois semaines suivant le confinement ont connu un ensoleillement exceptionnel.

6/ Mobilité.
Indice quotidien publié par Apple censé représenter la fréquentation des voies routières et des transports en commun. On voit la chute brutale résultant du confinement.image009

7/ Epilogue.
Tous les graphiques précédents sont inédits, mais les chiffres utilisés sont aisément accessibles et vérifiables. En entrant dans le détail, il est loisible à chacun d’en tirer ses propres conclusions.

En définitive, alors que la nation a été plongée dans la léthargie pendant deux mois, les conséquences sur la « qualité de l’air » – telle qu’elle est définie réglementairement – ont été pratiquement indiscernables pour dire le moins, et plutôt défavorables en moyenne. Voilà qui pourrait être l’occasion de quelques remises en question sur la validité des critères, la pertinence et l’efficacité des dispositifs réglementaires et autres considérations. Mais gageons que personne ne s’y hasardera, au risque d’ouvrir une brèche dans un système conceptuel patiemment édifié depuis des décennies.

8 réflexions au sujet de « De quoi qu’on a (eu) l’air? »

    • Si sadisme, cela sous entend connaissance de ce que « cela ne sert à rien », je crois malheureusement qu’il ne s’agit que d’ignorance, d’incompétence, là encore un dogme.

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    • Cet article ne relève que des mesures. Ainsi, il y a une diminution des
      la concentration en NO2 dans la zone trafic. Je suppose qu’elle est significative. Il n’y a pas d’interprétation. Par contre, on aimerait une tentative d’interprétation des valeurs augmentées des PM10 et PM2,5 pendant le confinement. Je suppose que les différences sont significatives. Il y a un pic (accidentel?, chauffage?) la semaine du 23 mars. A mon avis, cela semble confirmer que le trafic diminué entraîne une diminution du NO2. Les variations des teneurs en particules ne sont pas en corrélation avec les variations de NO2; elles ne sont donc pas liées au trafic, ce qu’on savait déjà. L’ozone est quant à lui plus fonction de l’ensoleillement et n’est pas un bon indicateur de la pollution urbaine : il varie de la même manière dans le secteur rural.
      Je ne comprends pas la peur de revoir les concepts qui vont continuer à inspirer les actions supposées nécessaires contre la pollution de l’air en ville.C’est pourtant la mission que se donne MMM.

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      • DULIEU. Sur ces quelques points que vous soulevez, vous pourriez vous référer aux derniers paragraphes des deux articles précédents (23 avril : §6 « premières impressions » et 16 juin : §7 « conclusions »), où on donnait quelques pistes d’interprétation, que vous esquissez vous-même d’ailleurs. Quant à votre dernier alinéa, Benoît vous répondrait mieux que moi ; c’est déjà pas mal d’avoir simplement exposé quelques faits et chiffres…
        Michel

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    • Cunctator91 Vous n’avez pas bien lu le tableau (et les commentaires associés) : on voit en effet que la concentration en NO2 aux stations trafic a été inférieure de 20 à 30% pendant le confinement (31 contre respectivement 47 avant puis 38 après) ; quant aux stations de fond : on a eu 17 contre 25 avant, mais 14 après. Vous noterez par ailleurs sur le graphique que les fortes concentrations en NO2 (qui influent évidemment sur la moyenne de la première période) ont eu lieu surtout en période hivernale et avaient déjà commencé à baisser avant le 17 mars.
      Enfin, comme cela a déjà été signalé dans les articles précédents, ce sont essentiellement les particules qui sont considérées par les pouvoirs publics comme néfastes et donnent lieu à la majorité des épisodes dits d' »alerte » et d' »information » (suivis par l’Ozone en périodes d’été, à cause de l’ensoleillement). Le NO2 n’a plus été cause d’aucun épisode d' »alerte » depuis plus de 20 ans et à seulement 2 épisodes d’ « information » depuis 5 ans (le dernier en juillet 2018).
      Mais il fallait bien trouver quelque chose.
      Bien à vous
      Michel

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