Les pales des éoliennes seraient-elles construites sur du vent ?

par Haco.

En avant-propos, je tiens à préciser que je suis juriste de formation et de profession. La France est dotée d’un système de publicité foncière, qui permet à toute personne, à partir des références cadastrales d’une parcelle, d’obtenir toutes les informations juridiques sur cette parcelle (propriétaire, prix, servitudes, hypothèques) y compris la copie des divers actes qui ont pu conférer des droits à quiconque sur cette parcelle.

Curieux de voir comment étaient réalisés les montages juridiques d’installation des éoliennes, je me suis donc procuré la copie de l’un d’entre eux.

Le montage que j’ai pu observer est le suivant :
  • Le propriétaire de la parcelle confère un bail emphytéotique à l’exploitant. Il s’agit d’un bail qui donne les mêmes droits à l’exploitant que s’il était propriétaire de la parcelle (droit de construire, de donner le bien en garantie, etc…), mais pour une durée limitée (50 ans en l’occurrence),
  •  L’exploitant négocie ensuite avec le même propriétaire, ou avec les propriétaires voisins selon le cas, le droit de passer sur leurs parcelles les câbles permettant le raccordement au réseau d’électricité, via une servitude dite de tréfonds,
  • Concernant les pales de l’éolienne et à ma grande surprise, celles-ci ne sont pas incluses dans le bail emphytéotique. Sans doute pour des raisons d’économie, les pales dépassant largement la base de l’éolienne, la surface donnée à bail ne comprend pas toute la largeur des pales.

Pour remédier à ce problème, les juristes ont créé une servitude de surplomb permettant aux pales de survoler la propriété voisine.

Pour les néophytes, une servitude au sens du droit français, est un service rendu par un fonds servant au profit d’un fonds dominant.

L’exemple type est le droit de passage d’une propriété enclavée sur une autre propriété.

Une servitude ne peut par ailleurs, selon la cour de cassation, « être constituée par un droit exclusif interdisant au propriétaire du fonds servant toute jouissance de sa propriété. »

Et c’est là que le bât blesse… Car la servitude de surplomb n’existe pas dans le Code civil. Au surplus, elle a d’ailleurs fait l’objet pendant des années d’un refus systématique par la cour de cassation, qui refusait de l’appliquer justement parce qu’elle interdisait au propriétaire toute jouissance de sa propriété.

Dans un arrêt de 2008, la cour de cassation, sans doute soucieuse d’apaiser les problèmes de voisinage, a tout de même admis que la servitude de surplomb puisse être acquise par prescription, c’est-à-dire qu’un propriétaire qui surplomberait la propriété d’un autre (typiquement un débord de toiture) puisse au bout de 30 ans réclamer l’application de cette servitude.

Mais la cour de cassation ne s’est jamais à ma connaissance prononcée sur la validité d’une servitude de surplomb conventionnelle, c’est-à-dire constituée dans un contrat.

Autrement dit, à ce stade, la servitude permettant aux pales des éoliennes de survoler la propriété voisine n’a jamais fait l’objet d’une validation quelconque ni par la loi ni par les tribunaux.

L’on ne peut évidemment exclure que ce soit le cas dans l’avenir, mais dans l’immédiat, cela signifie que les exploitants d’éoliennes, largement subventionnés, prennent le risque que leurs montages (qui plus est à long terme) soient ultérieurement remis en cause… et que les pales des éoliennes ne soient plus utilisables.

Souhaitons pour les économies du contribuable qu’il n’y ait pas de litiges dans l’avenir ou que si tel était le cas, les tribunaux valident l’existence d’une servitude de surplomb conventionnelle…

4 réflexions au sujet de « Les pales des éoliennes seraient-elles construites sur du vent ? »

  1. On peut couper les bouts des pales des éoliennes…
    Tant pis pour la baisse des rendements, de toute façon ce sont le sommateur et le tribuable qui paient…
    Sinon, est-ce que cette manière de voir n’est pas un peu capillotractée ?
    Sur un champ d’éolienne il doit y en avoir une ou deux dont les pales survolent la propriété voisine. Propriété qui est forcément inhabitée puisque les éoliennes sont au moins à 500 m d’une habitation.

    Maintenant, je vois bien la Fédération Environnement Durable s’emparer du problème (ou plutôt de la solution…).

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  2. C’est le principe du bail emphytéotique qui est le plus préoccupant, c’est une sorte de propriété temporaire qui s’affranchit de toutes les contraintes pouvant survenir après le bail.
    Si l’entreprise fait faillite, ou après la fin du bail, s’il y a des travaux de remise en état à faire, c’est le proprio qui paye. Or la provision demandée aux entreprises est notoirement insuffisante.
    Et personne ne sait ce qu’il arrivera en fin de contrat avec l’état, fin des subventions, coûts de maintenance pour des éoliennes construites pour 20 ou 25 ans….
    Bref, je n’accepterais jamais une éolienne sur mon terrain.

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  3. Paraît qu’un tribunal a condamné un vendeur d’un bien, à dédommager l’acquéreur, car il a été prouvé que le vendeur savait qu’un projet éolien allait se construire dans le voisinage immédiat?
    Quid des dommages pour perte de valeur de votre bien même à 501 mètres d’une éolienne
    Comme dirait l’autre, cette filière bénéficie « d’un vent favorable » qui lui permet de s’affranchir de toute régularité.
    En tout cas, avant d’acheter un bien, il est bon de se renseigner,
    A quand des conditions suspensives sur ce sujet?
    Le dernier cas que je connais est celui d’un hameau dans un bled perdu(région Chimay,
    quelques maisons de pierre, une chapelle « de caractère »
    des propriétaires font de gros frais pour mettre en valeur leur bien, et garder le caractère vraiment spécial du lieu
    Arrive un projet éolien, qui va ruiner leurs espérances( en plus ils sont sous le vent dominant)Plainte , audience en urgence ordonnant la quqpension des travaux
    peine perdue, quand l’affaire est venue en débat, le parc était construit et en fonctionnement, vous comprenez ,il faut sauver la planète
    Que n’avaient-ils une petite zone humide agrémentée de campanules

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    • On peut aussi se poser quelques autres questions :
      – qui doit remettre le sol en état à la fin du bail ?
      – le principe du pollueur-payeur est-il appliqué ?

      Pour mémoire, les fondations d’une éolienne consiste (pour un terrain « idéal ») en 250 à 400 m³ de béton et 30 à 42 tonnes de ferraillage (hors virole/cage d’ancrage, qui pèsent entre 12 t et 16 t)

      Eh bien :
      La durée de vie d’un parc éolien est estimée à 20 ans, une fois l’exploitation achevée la réglementation précise, dans l’article L 553-3 du Code de l’environnement, que l’exploitant d’une éolienne est responsable de son démantèlement et de la remise en état du site.
      Le démantèlement ne prévoit cependant pas d’enlever le socle en béton de l’éolienne, car celui-ci n’a pas d’intérêt à être recyclé : le coût du transport serait largement supérieur au gain obtenu.

      C’est le loueur du fonds qui a de la chance !
      Il hérite de presque 1 000 tonnes de béton ferraillé gratos !

      https://eolienne.f4jr.org/projet_eolien/installation
      https://eolienne.f4jr.org/projet_eolien/demantelement

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