Autre rapport, autre chiffre…

Le Gouvernement vient de lancer un « plan national de lutte contre le harcèlement dans les transports. » L’intention est d’éradiquer (ou, plus modestement, de réduire) les agressions dont les femmes sont victimes de la part des hommes parce qu’elles sont des femmes. L’expression consacrée est le « harcèlement sexiste ». Étant de sexe masculin, il est sans doute imprudent de ma part d’écrire les lignes qui suivent, mais on ne choisit pas toujours les sujets sur lesquels on tombe.

En préambule, il convient sans doute que je marque mon évidente désapprobation à toute forme d’agression physique ou morale. Iil est important de ne pas sous-évaluer le caractère pénible, voire angoissant, des incivilités telles que le harcèlement sexiste, et il est tout à fait normal que le Gouvernement se pose la question des moyens à mettre en œuvre pour s’attaquer à ce problème.

Cela étant posé, mon attention a été attirée il y a quelques semaines par la publication d’un rapport par le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes (HCEfh) qui signale notamment (p. 5) que « 100% des utilisatrices des transports en commun ont été victimes au moins une fois dans leur vie de harcèlement sexiste ou agressions sexuelles ». En vieil habitué des transports en commun (mon côté écolo…), et notamment en banlieue nord de Paris, je dois dire que j’ai quand même été un peu surpris d’un tel pourcentage. Qu’il y ait des moments où l’on ne se sente pas trop à l’aide dans les transports, certes. Que de nombreuses femmes aient dû subir du harcèlement sexiste, c’est tout aussi certain.

Mais 100%…

La source mentionnée dans le rapport pour ce résultat est un laconique « Résultats des consultations menées par le HCEfh, mars 2015 ». J’ai donc fait ce que tout citoyen un peu préoccupé de la qualité des rapports officiels devrait faire plus souvent : j’ai écrit au HCEfh pour leur demander des détails sur leur méthodologie.

Réponse : ce chiffre est issu d’une consultation d’une soixantaine de questionnaires collectés à l’issue de rencontres organisées sur le thème « genre et espace public ». En gros, c’est un peu comme faire un sondage dans une file d’attente à un distributeur bancaire grec pour demander à ceux qui font la queue s’ils souffrent du manque de liquidités.

Mon interlocutrice du HCEfh m’a explicitement dit qu’il s’agissait, via cette courte enquête, d’obtenir « un chiffre d’appel ». C’est vrai que 100% en est un, mais il est tout de même éthiquement fort contestable de l’utiliser sans la moindre prudence et à des fins de communication. Lorsqu’un organisme public s’autorise une telle manipulation des chiffres, il obtient peut-être l’effet médiatique recherché, mais à un prix qu’il ne mesure sans doute pas : la perte d’une part de sa crédibilité. Une noble cause n’a pas besoin de « chiffres d’appels » pour être défendue.

14 réflexions au sujet de « Autre rapport, autre chiffre… »

  1. Merci d’avoir fait l’appel pour nous-moi! Le 100% sentait sa féministe de choc.
    Mais la question portant sur le {Il existe au moins un … } qq soit la durée de cumul …et sans préciser l’intensité, il était logique que toutes les femmes répondent positivement. Il y a même des dragueurs qui prétendent qu’en essayant au moins 10 fois cela marche à 100% (on gagne un ticket). Le matheux de l’étape pourrait nous dire combien il faut de « dragueurs » insensibles pour que toutes les femmes puissent répondre positivement à la question.

    Quel % aurait on obtenu en posant la question « qui n’a pas encore été au moins une fois l’objet d’attention galante dans les transports »? (homme ou femme).

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  2. Coucou,

    Contrairement à vous, ce chiffre au doigt mouillé ne me chiffonne pas ; c’est sans doute la triste vérité. Toutes les femmes au cours de leur vie se font agresser verbalement , au minimum. De la drague lourde à l’irréparable .

    Une journaliste avait fait une video dans les rues de new-york en caméra cachée. le resultat est …..

    Toutes les femmes, cela va t il mieux que 100% ?

    Bonne journée

    Stéphane

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    • Je ne dis pas que le problème n’existe pas, juste que le chiffre n’est pas démontré si ce n’est par un sondage biaisé. « Dans la rue » ce n’est pas dans les transports, « Bew York » n’est pas la France, « une journaliste » n’est pas un institut de sondage.

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      • Bonjour,

        Donc la question était elle:
        une employée d’un organisme d’etat ou affilié peut -il ou elle publier une opinion sans statistique ou avec des statistiques manifestement incomplètes (non sérieuses, fausses voir bidonnées ?
        et que de ce fait, ses propos sont ils nécessairement nuls, caduques, démagogique, partisans, faux ?

        Comme disait churchill , les statistiques …

        Sur le principe je suis d’accord avec vous; après, un peu de tolerance , pour faire avancer de bonne idées et essayer de domestiquer la bête sauvage tapie au fond de nous.

        Bonne journée

        Stéphane

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      • Baloo, lire sous votre plume « et que de ce fait, ses propos sont ils nécessairement nuls, caduques, démagogique, partisans, faux ? » alors que j’ai pris toutes les précautions possibles dans mon texte pour éviter cette interprétation est franchement pénible.
        La tolérance au mensonge « pour la bonne cause », ce sera sans moi. Rigueur ou facilité intellectuelle : choisis ton camp, camarade.

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    • « Une journaliste avait fait une video dans les rues de new-york »

      Ce reportage et notamment son montage ont aussi très critiqués il me semble…

      La drague lourde peut être gênante mais ce n’est pas une agression sexuelle, il ne s’agit pas d’hommes qui se « frottent », bref pas grand chose à voir.

      C’est sûr que d’agréger drague beaucoup trop insistante, contact non voulu (les mains qui se touchent dans le métro), chantage sexuel, agression sexuelle … ça peut vite faire monter les statistiques avec « tout ce qui peut mettre une femme mal à l’aise ». Et tant pis si on mélange des comportement considérés comme « mal élevés » mais légaux et des comportements illégaux!

      Les « féministes » progressistes adorent ça, ça leur permet de justifier des mesures liberticides.

      Ne vous étonnez pas qu’aux USA ont les appelle « feminazi ».

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  4. Pourtant il m’a semblé avoir par mégarde entendu l’autre jour dans un transport collectif une vieille femme, grosse, laide, manifestement pauvre, au vocabulaire à faire rougir un chauffeur de taxis, affirmer haut et fort qu’elle aimerait bien se faire violer, mais qu’elle n’y arrive pas . . . les 100% sont donc bidons ! 🙂

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