CO2 : Byzance, ou le diviseur qui divise

par Rémy Prud’homme.

Le parti au pouvoir est secoué sur une question grave : D’ici 2050 la France doit-elle diviser ses rejets de CO2 par 4, par 6 ou par 8 ? Le diviseur était depuis longtemps fixé à 4, un objectif dont on voit d’ailleurs mal comment il pourrait être atteint. Mais qui ne suffit pas aux lycéens et aux écologistes. L’avenir du climat, et de l’espèce humaine, sont en balance. Qu’à cela ne tienne, portons-le diviseur à 6 ont dit les modérés du parti. Non, ont protesté quelques extrémistes, et les ONG. Il nous faut 7, ou 8. Pour éclairer ce choix stratégique crucial, et ramener la paix au sein du gouvernement, nous avons cherché à estimer ce qui est en jeu, c’est-à-dire les conséquences sur le climat.

     On le fait en s’appuyant sur les données du GIEC, qui n’est pas suspect de minimiser la gravité du problème. Le GIEC nous dit que la température du globe dépend du stock de CO2, et plus précisément qu’un doublement de ce stock causera une augmentation de 1,5 degré centigrade (dans l’immédiat, davantage un siècle plus tard). Le stock augmente chaque année de la moitié des émissions annuelles de CO2, l’autre moitié étant absorbée par les océans et la végétation. Le stock de CO2 de l’atmosphère est actuellement de 3200 milliards de tonnes. Les rejets actuels du globe sont de 33 milliards de tonnes, ceux de la France 0,33 milliards de tonnes. Ces quatre chiffres suffisent pour apprécier les enjeux.

     Il est facile de calculer que si l’ensemble du globe, y compris la France, continuait d’émettre du CO2 au niveau actuel, le stock de CO2 augmenterait d’ici 2050, et la température du globe avec lui : d’environ 0,2 degré centigrade. La contribution de la France à cette intolérable augmentation de température serait de 0,0026 degré. Mieux vaut s’exprimer en dix-millièmes de degré : 26 dix-millièmes de degré. Si la France réduisait à zéro ses rejets progressivement d’ici à 2050, la température du globe en 2050 en serait diminuée de 13 dix-millièmes de degré.

     La division par 4 de nos rejets entraînerait une moindre augmentation de température de 10 dix-millièmes de degré ; une division par 6 de 11 dix-millièmes ; et par une division par 8 de 12 dix-millièmes. L’enjeu du débat sur le diviseur est donc de 1 dix-millièmes de degré. Peut-on, sans se faire trop insulter, suggérer que cela n’est pas considérable ?

     Puisque la question passionne, c’est le mot, les lycéens, elle pourrait faire l’objet d’un joli exercice pluridisciplinaire. La professeure de sciences de la terre poserait le problème. Le professeur de mathématiques superviserait les calculs. La professeure d’économie expliquerait (soyons optimistes) pourquoi il n’est pas très utile de calculer des bénéfices en ignorant les coûts. Le/la professeur(e) de français commenterait le chapitre 8 du Quart-Livre de Rabelais qui raconte l’histoire des moutons de Panurge. Et le professeur d’histoire évoquerait les prêtres et les courtisans de Byzance discutant du sexe des anges en 1453, lorsque les troupes ottomanes faisaient le siège de la ville.

14 réflexions au sujet de « CO2 : Byzance, ou le diviseur qui divise »

  1. Coucou,
    Peut-etre que les jeunes veulent s’extraire de la termitiere. Juste exprimer une volonté de ne pas vivre un cauchemar , etre absorbe par les empires, un destin qui leur echappe. .
    La politique n’a rien a voir avec la rationalité , avec 0,00001.
    C’est le jeu subtil et passionnant de la politique, pour un homme de bonne volonté.
    Bonne journée

    Stephane

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  2. Merci Monsieur Prud’homme pour votre article.
    Bien qu’ils ne soient pas atteints par la maladie réchauffiste, je ne manquerai pas de présenter votre limpide démonstration, entre autres à mes petits-enfants, collégiens ou lycéens qui ont un niveau en mathématiques suffisant pour en comprendre les chiffres.

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  3. Non seulement le poids de la France dans les émissions est négligeable mais, en plus le poids de la France et des pays développés en général est considérable dans la recherche de solutions techniques. Pense t on sérieusement que ce seront les pays africains qui vont trouver des sources d’énergie miraculeuses ? Si tant est que l’on croie au problème du changement climatique, le meilleur service que peuvent rendre les pays développés est de ne pas s’épuiser à mettre en œuvre de mauvaises solutions (éoliennes…) mais bien au contraire de pousser leur croissance en se débarrassant des boulets et de consacrer à la recherche (fusion…) des efforts que les pays du tiers monde ne sont pas en état de faire.

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  4. Cet article limpide et édifiant, démontre la totale déconnexion des politiques, journalistes et pseudo-intellectuels, etc… avec le réel, la logique, le simple bon sens.
    Quand on en est à ce point, tout est possible, surtout le pire.

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    • C’est très bien de mettre en évidence l’insignifiance des effets géophysiques obtenus par cette politique de diabolisation du CO2.

      Ce serait mieux, pour un économiste, de mettre en évidence qui sont ceux qui tirent économiquement les (plus gros) marrons du feux.

      Médaille d’or, d’argent et bronze.

      Ces 3 premiers suffirait à expliquer l’incohérence de la présence de Attal et Poirson à la manif d’hier

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  5. C’est vraiment très fort :
    « L’enjeu du débat sur le diviseur est donc de 1 dix-millièmes de degré. Peut-on, sans se faire trop insulter, suggérer que cela n’est pas considérable ? »
    Et la conclusion, délicieuse, à coups de « moutons de panurges » et de « sexe des anges ».

    Pourrais-je peut être suggérer de considérer le professeur de géographie qui montrerait où sont les pays les plus émetteurs sur la planète, qui expliquerait que l’énergie fossile abondante et peu onéreuse permet à des pays entiers de sortir de la pauvreté et que, demain l’Afrique fera de pareil que la Chine et l’Inde aujourd’hui car la réduction de la pauvreté compte plus que le climat (et c’est heureux mais on oublie trop en France de manifester pour nos pauvres, on manifeste pour le climat, quelle honte !).

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  7. Bonjour M. Prudhomme,
    Excellent! Néanmoins, il me semble que vos calculs supposent une relation linéaire entre la température et la concentration en CO2; pour de si faibles variations, on peut considérer que c’est une approximation acceptable. Mais qu’en est-il en réalité de cette relation? Quelle est la loi qui exprime la variation de t° en fonction du CO2? Dans une enceinte fermée, on sait qu’elle est logarithmique, mais l’atmosphère est semi-ouverte. En physique, on établi des lois et elles sont formulées de façon mathématique (U=RI, E= MC2, F= mGama, …)
    En fait, les petits génies de la climatologie sont bien en peine de nous donner ces précisions. Leur théorie ne repose sur aucune formulation mathématique et n’a donc aucune valeur prédictive.
    Dites-moi si je me trompe.

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  8. Bel article . Il serait bon d’en faire un chiffrant et décrivant les bénéficiaires des gains réalisés , des trafics imaginés aussi , dans le cadre des certificats d émissions de CO2
    Pour la rubrique à qui profite le crime de votre article , en plus des tribunes que ces dogmes sans fondement scientifique , offrent en politique mais aussi pour les scientifiques fervents catastrophistes …
    Etc

    Une enquête mettant en lumière cela donnerait je pense une utile corde à l arc des climato réalistes (je préfère ce terme à sceptiques , connoté et péjoratif )

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