LE GISS ET LES SERIES DE TEMPERATURES DE MARSEILLE.

Marius : « Il n’y a pas besoin de le remuer [le passé], il bouge bien assez tout seul » 
(Marcel Pagnol, Fanny)

(mise à jour simplifiée d’une note du 2 février 2015, encore accessible pour les curieux [1])

1/ Le site du GISS.

Les séries de températures relevées par les stations météorologiques du monde entier sont accessibles pratiquement en temps réel grâce notamment au GISS (Goddard Institute for Space Studies [2] département de la NASA) qui rassemble et traite les données transmises par les états. Il existe deux pages d’accès possibles, comportant respectivement un planisphère et une mappemonde (que l’on peut faire tourner). La seconde devrait à terme supplanter la première. Pour rechercher une station on peut, soit cliquer sur les cartes, soit inscrire le nom dans les fenêtres prévues à cet effet. Dans les deux cas, on a le choix entre différentes séries de données, mais par défaut le GISS donne une série « officielle » qui fait foi.

Le tableau ci-dessous donne pour chacune des pages de recherche : l’adresse URL, le fac-similé de la page et la dénomination de la série officielle.

https://data.giss.nasa.gov/gistemp/station_data/
https://data.giss.nasa.gov/gistemp/stdata/
 1_Marseille  2_Marseille
« after GISS homogeneity adjustment ». « GHCN V3, adjusted – homogeneized » [3].

On peut ensuite télécharger au choix des graphiques annuels préétablis ou des tableaux de données. Ces derniers comportent les températures mensuelles, agrégées par trimestres et par années météorologiques (de décembre n-1 à novembre n). On ne s’étendra pas sur l’ergonomie de ce site, qui est remarquable et que chacun peut expérimenter sans difficulté.

2/ La station de Marseille-Marignane.

Pour cette station, on dispose de séries longues depuis 1880, mais le GISS ne retient et ne fournit de données officielles qu’à partir de l’année 1934. L’attention de l’auteur de ces lignes avait été attirée par une bizarrerie. Ayant, pour les besoins d’un article, téléchargé en octobre 2014 des données « after GISS homogeneity adjustment », il souhaita les mettre à jour au début de l’année 2015. Mais la substitution de la nouvelle série à l’ancienne avait fait apparaître sur le graphique un mouvement de translation surprenant pour toutes les années antérieures à 1991. Il est alors apparu que les données de 1934 à 1990 avaient été systématiquement minorées de valeurs rondes. Par la suite, de nouveaux téléchargements effectués à intervalles irréguliers ont révélé des corrections successives, en augmentation ou en diminution et toujours de valeurs rondes. Le dernier téléchargement date du 22 janvier 2018.

Le graphique ci-après montre comment ont évolué les séries de températures « after GISS homogeneity adjustment » (aGha) de la période commençant en 1934, depuis octobre 2014 jusqu’à janvier 2018. Toutes les séries coïncident à partir de 1991 ; par contre entre 1934 et 1990 on obtient un chevelu de courbes ayant toutes la même allure générale mais situées à des niveaux différents. Les valeurs extrêmes peuvent ainsi différer de plus de 1,5°C.

3_Marseille

La dernière courbe en date est en rouge gras, l’avant-dernière (un mois avant) est en doubles traits rouges : en un mois, les températures antérieures à 1991 ont été réajustées (cette fois à la hausse) de 1,5°C environ.

A titre de curiosité, voici un graphique représentant les deux courbes relevées aux dates extrêmes d’octobre 2014 et janvier 2018. Par le plus grand des hasards, la coïncidence est presque parfaite.

4_Marseille

On entend d’ici les commentaires de nos sympathiques compatriotes : « Peuchère ! Tout çà pour çà ? ». Nous les laisserons à leurs galéjades, non sans leur conseiller de profiter sans attendre de la belle et chaude année 1937, qui ne saurait durer…

3/ Conclusions.

Toutes plaisanteries mises à part, l’exemple de Marseille est assez caricatural, mais intéressant en cela. Les données d’un certain nombre d’autres stations que nous avons examinées ont aussi, au fil des années, été l’objet d’ajustements, en général de moindre importance il est vrai. Ces corrections successives ne résultent certainement pas de l’imprécision des mesures plus anciennes dont on se serait subitement avisé, car ce sont toujours des valeurs « rondes » et systématiques s’appliquant à des regroupements d’années (et à leurs douze mois). Le GISS aurait certainement d’excellentes raisons à faire valoir pour expliquer ces ajustements incessants. Mais ils sont de nature à relativiser les débats interminables actuels sur telle ou telle année réputée plus ou moins « chaude » que telle ou telle autre, et ceci de quelques dixièmes de degrés de plus ou de moins.

Les données du GISS n’en constituent pas moins une base de données méritoire et précieuse, dont nous aurons l’occasion de reparler.


[1] http://www.climat-optimistes.com/le-giss-et-les-series-longues-de-temperatures/

[2] http://data.giss.nasa.gov/gistemp/station_data/. Goddard est le nom d’un ingénieur américain décédé en 1945, précurseur de l’astronautique.

[3] GHCN signifie « Global historical climatology network ».

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12 réflexions au sujet de « LE GISS ET LES SERIES DE TEMPERATURES DE MARSEILLE. »

  1. je vous recommande, si vous ne le connaissiez déjà un très bon site

    http://jennifermarohasy.com/

    elle a couvert toute la polémique avec le BOM australien, sur les curiosités ,pour le moins, des données relevées et affichées par le BOM à Darwin
    Si j’ai bon souvenir, après de multiples demandes, comme d’habitude laissées sans réponse, au final, ils s’étaient retranchés derrière l’argument qui coupe court à toute polémique
    « nous appliquons des méthodes d’homogénéisation et de rectification des données brutes suivant un modèle appliqué par tous les centres qui publient ce genre de données »
    fermer le ban
    un autre trublion publie tous les jours sur les modifications continuelles des relevés par la NOAA

    https://realclimatescience.com/

    et je crois me souvenir que Mr. Courtillot avait fait le même constat avec le CRU

    Je suis sur que les journalistes du monde se feront un devoir de traquer les fake news

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  2. Une autre analyse des étranges divagations des températures du passé à Marseille.
    https://oneillp.wordpress.com/2015/06/23/marseille-jan-1978/

    Les soubresauts des températures du passé ont été observée à bien des endroits dans le monde. Ici, une étude de comment le passé à changé au Paraguay
    https://notalotofpeopleknowthat.wordpress.com/2015/01/26/all-of-paraguays-temperature-record-has-been-tampered-with/

    Il y a aussi ces publications de 1950 et 1980 retrouvées par Notrickzone qui montrent que jusqu’au début des années 1980, on considérait que les températures s’étaient globalement accrues d’environ 1°C de 1880 à 1950 et avaient baissé d’environ autant les 30 années suivantes:

    http://notrickszone.com/2017/02/02/could-a-new-global-temperature-reconstruction-using-ice-cores-be-more-accurate-than-the-instrumental-record/

    Mais depuis, le passé s’est mis en devoir de se conformer avec le consensus climatique.

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  3. Je trouve ce commentaire très complaisant alors que cette incertitude de mesure voire la manipumation des données me paraît pour le moins scandaleuse dans le concert d’affirmations péremptoires et catastrophistes que nous subissons …

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    • Vous avez tout à fait raison. La situation est parfaitement scandaleuse, et ces sempiternelles manipulations de données n’honorent pas les « scientifiques » qui s’y prêtent. Encore ne s’agit-il là que d’un exemple. Une fois qu’on a dit cela, que fait-on ? Si les citoyens n’ont pas encore compris qu’ils sont soumis à un massif et incessant lavage de cerveau, c’est qu’ils ne veulent pas le savoir ; on peut donc essayer de leur en faire prendre conscience. Dès lors, il y a plusieurs angles d’attaque possibles. L’un est l’indignation, tout à fait honorable avec toutefois le risque de répondre à l’excès par l’excès. Un autre est la simple exposition des faits et des chiffres : la démonstration est sévère et n’est pas affaiblie par une pointe d’humour. Les thuriféraires de la « science » officielle en semblent totalement dépourvus, vous avez dû le remarquer. Mais peut-être nos compatriotes y sont-ils sensibles ?
      Cordialement.
      MD
      Pour répondre aux messages des autres correspondants, que je remercie, je connais bien entendu tous les sites qu’ils recommandent, et je m’associe à leurs recommandations. Peter O’Neill se référait d’ailleurs à mon papier de 2015 dont il donnait le lien. A titre d’autre exemple, on peut trouver de temps à autres d’amusantes images animées de graphiques de températures « avant-après » sur le site d’Anthony Watts (Watts Up With That).

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  4. cOUCOU,

    Je crois que les données brutes subissent quelques traitement avant les calculs proprement dit; il y avait eu une controverse il n’y a quelques années à ce sujet; tout avait été expliqué, la méthode verifiée et reverifée et donc approuvée.

    La question que je me pose, et que si on applique un filtre à des données qui ne sont pas brutes, mais déja « modifiées », cela ne pose t il pas un problème ?

    Bonne journée

    Stéphane

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  5. J’avais telecharge des données homogeneisees et brutes de plusieurs villes aux 4 coins du monde (France, Allemagne, Portugal, Suede, Inde, …). Très franchement les quelques traitements effectués ne donnaient pas de tels écarts !! Au pire j’avais noté +/- 0.2°C dans quelques points minoritaires. Et quand on calcule les moyennes mobiles sur toutes ces données, ça ne changeait pas grand chose. Par contre ce qui saute aux yeux, c’est l’allure similaire pour toutes avec une augmentation plus ou moins progressive de 1.2° à 1.6°. Que ça soit à Oslo qui est passé de 1° à 2.4° , ou Bombay de 26° à 27.6° pour ne citer que les deux extrêmes que j’ai tracés. C’est intéressant, car on voit par exemple qu’une ville du Sud est de la france passée de 15° à 16.5° s’est rapproché de la moyenne de Lisbonne (d’il y a 50 ans…), car Lisbonne elle même est aujourd’hui à 17.3°…

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  6. Moi je n’ai pas compris pourquoi on ne traite pas les vraies données en valeur absolues (sans donner un écart par rapport à une T° de référence). Les bidouillages statistiques, ouais, bof… on prend des données réelles et on les écarte de cette réalité… on le voit bien dans cet article, puisque un bidouillage statistique à un instant t n’est plus le même 10 ans plus tard… quel bidouillage statistique faut-il prendre pour le considérer le plus de la réalité ?

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  7. MD,

    Bravo, bien trouvé, votre graphique est hilarant !

    Cela dit :

    « Les données du GISS n’en constituent pas moins une base de données méritoire et précieuse, dont nous aurons l’occasion de reparler. »

    Je déconseille vivement l’utilisation des données GISS. Mes informations ne sont pas tout à fait fraîche mais je n’ai pas connaissance de changements dans la situation. GISS ne fait que reprendre la base GHCN et ajoute un étage supplémentaire de retraitement. La cible de GISS est l’évolution globale des températures et pas la cohérence locale des séries. Les moyens consacrés à ce produit sont beaucoup plus faibles que pour CRUTem ou BEST par exemple. Il n’y a pas d’unité méthodologique dans la construction GISS. En particulier pour la France, les données sont premièrement homogénéisées par MétéoFrance puis reprises dans la base GHCN sous la dénomination trompeuse de séries brutes. GHCN procède à un nouveau traitement pour obtenir les séries GHCN homogénéisées utilisées comme source brute par GISS. Les différences entre courbes de votre graphique sont, à mon avis, typiquement le résultat du dernier étage de retraitement propre à GISS.

    De ce fait, le produit GISS ne présente pratiquement aucun intérêt tellement il est éloigné des observations.

    BEST est probablement le plus intéressant du point de vue méthodologique. Le lien avec les données brutes est en principe relativement direct et clair (malheureusement pas pour les données françaises notamment).

    D’autre part, quelque soit le traitement, les observations des températures aux stations météo n’ont pas d’intérêt direct pour la climatologie. Il y a suffisamment de moyens de contrôle pour le démontrer. Les tendances à long terme des données des stations ne reflètent aucunement l’évolution régionale des températures.

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