Une analyse des signataires de l’appel des scientifiques pour sauver la planète dont il a déjà été question ici-même.
par Rémy Prud’homme.
15 600 scientifiques nous disent, une fois de plus, que tout va mal, de plus en plus mal, sur la planète. C’est la science qui parle. Il faut immédiatement mettre un terme au capitalisme et à la croissance et faire marche arrière. Le hasard fait bien les choses : leur manifeste est publié moment précis où la COP 23 se réunit ; ce qui n’a hélas pas empêché la COP d’être un échec complet. Tous les médias ont largement fait écho à ce cri d’alarme, sans même chercher à savoir qui étaient ces scientifiques désintéressés, et ce qu’ils disent.
Le texte émane de l’Union of Concerned Scientists. Le nom de cette association se traduit par Union des Scientifiques Engagés, plutôt que « concernés ». Elle est bien plus engagée que scientifique. Elle est née aux Etats-Unis, au prestigieux MIT, pour protester contre la guerre du Vietnam, un souci certes légitime mais, on en conviendra, assez peu scientifique. Elle s’est ensuite réorientée dans la protestation contre l’armement nucléaire (occidental, pas soviétique bien entendu). Et elle se spécialise maintenant dans l’alarmisme environnemental. Elle est à cet effet généreusement financée par toutes sortes de dons et de fondations. Elle est un lobby comme un autre, qui a la particularité d’être enveloppé dans le manteau de la science.
Un manteau un peu usé, pour ne pas dire troué. L’appel de novembre 2017 est un bref texte de trois ou quatre pages (assez peu pour un article « scientifique » sur un sujet aussi vaste) publié dans une revue amie, Bioscience, qui se prête à l’opération. Le texte s’appuie sur seulement quatre références (pas beaucoup pour un article « scientifique »). Le principal auteur (il y en a sept ; ça c’est scientifique) est professeur à l’Oregon State University, dont la réputation et l’autorité scientifique n’est pas exactement celle du MIT.
Le moins que l’on puisse dire du contenu de l’article est qu’il est quelque peu orienté. On en donnera un exemple. L’un des thèmes concerne les forêts qui, selon les auteurs, fondraient comme neige au soleil. Pour le démontrer, l’article présente le graphique suivant. Le haut de la courbe correspond à l’année 1992, le bas à l’année 2016.
Le lecteur ne peut manquer d’être impressionné par le déclin vertigineux de la couverture forestière de la planète. En réalité, la surface des forêts a diminué de 2,5% pendant ces 24 années, moins de 0,1% par an. On peut penser que c’est beaucoup trop. Mais cacher une réalité modeste derrière une image dramatique n’est pas très « scientifique ».
Comment passe-t-on de 7 à 15 600 scientifiques ? On invite les lecteurs qui le souhaitent à cliquer sur un lien internet. Ceux qui cliquent ont-ils lu l’article ? Sont-ils vraiment scientifiques ? Cliquent-ils une seule fois ? Aucune vérification n’est possible. Toujours pas très « scientifique », même s’il y a des statisticiens (plus engagés que statisticiens sans doute) parmi eux.
Tout ce que l’on peut chercher à savoir, c’est ce que disent les signataire sur ce qu’ils sont. On a examiné 197 signatures choisies aléatoirement. On peut les classer en quatre groupes.
1) 30% sont de vrais scientifiques, des universitaires, dont la moitié sont des professeurs et l’autre moitié de futurs professeurs (des professeurs assistants ou des lecturers). La plupart sont des professeurs de science, mais on trouve également des professeurs de linguistique, ou d’éthique, dont la compétence dans le domaine n’est pas évidente.
2) 29% travaillent dans des institutions de recherche non universitaires. La plupart sont sans doute de vrais scientifiques, dont on ne peut malheureusement pas bien apprécier le niveau. Mais nombreux aussi sont ceux qui y occupent des postes administratifs ou techniques ; on y trouve par exemple un employé d’un zoo ou d’un aquarium ; leur qualité de scientifique est encore plus difficile à apprécier.
3) 18% ne donnent aucune précision sur le statut. On trouve, par exemple : entomologiste, Allemagne, ou encore : architecte, Brésil, ou : écologie routière, Etats-Unis. Beaucoup d’entre eux ne méritent sans doute guère le qualificatif de scientifiques.
4) Enfin, 23% sont des étudiants en master ou en doctorat, ou en post-doc, qui sont davantage des scientifiques en devenir que des scientifiques. Au total, les véritables scientifiques, ayant publié un nombre raisonnable d’articles dans des revues internationales (faut-il compter Bioscience dans cette catégorie ?) ne sont à peu près sûrement pas majoritaires parmi les signataires. Ils ne constituent qu’une toute petite fraction des scientifiques du domaine.
Quelques minutes de réflexion suffisent pour montrer que tout cela nous éloigne beaucoup des pratiques scientifiques les plus élémentaires. De toutes façons, l’idée même de déterminer ou de renforcer la vérité par le vote plutôt que par l’argumentation est une idée parfaitement anti-scientifique. N’en déplaise à l’unanimité des médias, nous sommes ici davantage en présence d’une opération de lobbyistes que de savants.
Donc, LeJournal de référence qui titre « Le cri d’alarme de quinze mille scientifiques sur l’état de la planète » a fait à minima une erreur mais probablement une fake-news car l’Union of Concerned Scientists est composée de scientifiques ET de citoyens (https://fr.wikipedia.org/wiki/Union_of_Concerned_Scientists). Avec les médias importants, on balance souvent entre une erreur involontaire et une fake news. Néanmoins, comme ces médias, « les meilleurs d’entre tous », se targuent de toujours bien vérifier leurs sources, d’avoir les meilleurs techniques journalistiques pour ne s’en tenir qu’aux faits, l’erreur ne peut être aussi fréquente, surtout jusque dans le titre d’un article. Il faut donc comprendre qu’ils publient volontairement des FakeNews. C’est triste mais c’est ainsi.
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Bonjour
Une analyse intéressante, sur le seul plan économique, de cet appel malthusien
https://blog.francetvinfo.fr/classe-eco/2017/11/19/environnement-limpossible-equation-decroissante.html
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Perso, j’ai toujours pensé qu’au lieu de parler de réduire les « inégalités » (de revenus s’entend), le principal problème est celui de réduire la pauvreté, quel que soit le pays dont on parle.
Que pour y arriver, on utilise, entre autres, la fiscalité, et que, en final il y ait une, légère, diminution des « inégalités », pourquoi pas, mais ce n’est surement pas la seule solution !
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» N’en déplaise à l’unanimité des médias, nous sommes ici davantage en présence d’une opération de lobbyistes que de savants. »
Merci pour cette analyse pertinente qui a surpris mais intéressé. Le journalisme scientifique est sinistré, en France comme ailleurs.
Misère de notre grande presse vendu au grand méchant capitalisme…
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oups, vendu(e) !
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Pour le Climathon de Novembre, je voudrais lancer un bläme envers un(e?) journaliste de Science et Vie (pourtant…), parlant de la disparition de certaines îles dans le Pacifique, ça démarrait plutôt bien !
Voilà t y pas que notre plumitif n’emplois PAS UNE SEULE FOIS le terme Réchauffement Climatique Anthropique, ose parler des Alizée qui entraînent une sorte de surcote dans cette partie du Pacifique, et surtout, vade retro satanas, ose écrire que la disparition des îles est dûe à l’érosion, même pas anthropique !
Il ou elle aggrave son cas en disant que les îles entourées de coraux ou ayant conservé des mangroves résistent mieux et ne sont pas près de disparaître.
Je trouve scandaleux que on laisse passer ce genre de vérités d’observation, au risque de f*** en l’air la propagande officielle de pensée unique climatique.
bref, vous l’aurez compris JE SUIS Outré !
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