Par le jury du climathon (Benoît Rittaud, MisO, Murps et Yanarthus)
Cette semaine, un compétiteur a écrasé la concurrence d’une manière originale : plutôt que de tout miser sur une seule réalisation, le journal Le Monde s’arroge le titre de vainqueur de la semaine 23 grâce à son tir groupé de trois articles de propagande. Récompensé en quelque sorte pour l’ensemble de son œuvre, le Journalderéférence conforte sa réputation de Pravda climatique que la presse entière lui envie.
Tout d’abord, bien sûr, il y a cet article signé de Stéphane Foucart qui se jette avec gourmandise sur la récente publication d’une étude (Karl et al.) qui annonce avoir retrouvé le réchauffement climatique qui se cachait — le coquin — dans un traitement statistique qui ne demandait qu’à être revu. Titré « La ‘pause’ du réchauffement climatique était un mirage« , cet article du Monde se débarrasse enfin de ce qui restait encore parfois un frein à la propagande climatique (pour ne pas dire une plaie) : l’usage du conditionnel. En fait de climat, certes, ce mode n’était jamais qu’une manière pratique de se ménager une porte de sortie à chaque annonce fracassante. Toutefois, puisque même les plus délirantes d’entre elles sur le climat ne sont heureusement jamais corrigées après coup… Le conditionnel constituait donc un anachronisme, le vain résidu d’une tradition journalistique heureusement révolue où les annonces étaient traités avec un minimum de prudence. La COP est pour bientôt, il est important de bien formater les esprits de ne pas brouiller le message sur l’urgence.
Le jury salue donc la décision de Stéphane Foucart d’écrire enfin à l’indicatif, faisant de Karl et al. une nouvelle Table de la Loi. Après avoir désigné l’Ennemi (les très vilains thinks tanks américains climatosceptiques), l’article se complaît à présenter cette étude parue dans Latrèsprestigieuserevuescience, qui montre avec force seaux d’eau et bouées dérivantes que, en vrai, il n’y a aucun ralentissement du réchauffement depuis 1998.
Si le jury du climathon ne peut qu’applaudir à ce nouveau tour de force, il estime toutefois utile de mettre Stéphane Foucart en garde, ainsi que tous ceux qui, comme lui, voudraient se lancer inconsidérément dans le maniement du nouveau jouet qu’est Karl et al. :
- cette nouvelle étude pourrait suggérer à des esprits immoraux qu’il règne un certain désordre aussi bien dans les méthodes de mesure de la température globale que dans les corrections statistiques qui leur sont appliquées ;
- une phrase telle que « [La] réanalyse des données de température rend obsolètes les calculs du GIEC » remet en cause le consensus climatique et la réputation de milliers de climatologues mondialement réputés.
Le jury du climathon ne saurait accepter de tels écarts et rappelle donc monsieur Foucart aux devoirs de sa fonction de journalistaumonde.
Dans les pages « Idées » du même Journalderéférence, on peut lire ce billet tout en nuances intitulé « Changement climatique : tous les voyants sont au rouge ». Insatisfait des misérables +4,5 °C de la prophétie ordinaire pour 2100, l’auteur annonce un apocalyptique « 6 à 8 °C au cours des deux prochains siècles ». En utilisant le conditionnel réglementaire (malgré l’initiative de Stéphane Foucart), l’auteur déroule alors la litanie des calamités : les récifs coralliens seraient très touchés, tous les extrêmes climatiques, ou presque (sic), deviendraient plus fréquents ou/et plus intenses, les risques de conflits violents pourraient être indirectement accrus, « la calotte du Groenland pourrait disparaître en un millénaire ou plus si la température était maintenue au-dessus d’un certain seuil (re-sic), ce qui correspond à 7 m d’élévation du niveau de la mer »…
Le plus angoissant est sans doute la phrase suivante :
La seule évocation d’un réchauffement de 4 à 5 °C fait état de risques élévés à très élevés.
Voilà qu’il suffit d’évoquer quelque chose pour que des cataclysmes se réalisent. Surveillons nos paroles ! Et même nos pensées ! Elles nous font courir des dangers grands à très grands, avec un niveau de confiance élevé à très élevé !
Au fait : qui est l’auteur de cet article ? Un journaliste en mal de sensationnalisme ? Un membre d’une ONG « tirant la sonnette d’alarme » ? Point du tout, il s’agit d’un homme politique scientifique bien connu, qui n’est autre que Jean Jouzel.
Le troisième morceau de bravoure du Journalderéférence s’est à l’évidence inspiré de notre vainqueur de la semaine dernière, qui rapprochait la lutte contre le réchauffement climatique de la Résistance française à l’occupant lors de la Seconde Guerre mondiale. Titré « Au Burkina Faso, les résistants au réchauffement climatique » et écrit par Laetitia Van Eeckhout, l’article accorde une large place aux propos sur le climat tenus par Claire Gaillardou, dont les compétences scientifiques sont attestées par son appartenance à Action contre la Faim. Les résistants dont il est question sont les habitants de la région de Bogandé, dont les difficultés d’existence sont instrumentalisées de façon particulièrement abjecte magnifiquement mises en perspective, notamment en s’abstenant d’écrire une seule fois le mot « météorologie » pour lui préférer les « événements climatiques » (dévastateurs, comme il se doit).
Sensible à cette remarquable pièce de propagande climatique, le jury décerne en revanche un blame à cet article de SciDevNet intitulé « Sahel : les changements climatiques, une aubaine pour la pluie », qui a osé rapporter les résultats d’une étude scandaleuse selon laquelle l’évolution actuelle du climat pourrait être autre chose que profondément, universellement et systématiquement néfaste. Fort heureusement, SciDevNet a rapidement fait amende honorable, ce qui lui vaut de voir son blâme finalement retiré.
Les accessits de la semaine
C’est à peine croyable, et pourtant… l’océan, qui couvre 70% de la surface du globe, qui absorbe 25% du CO2 émis chaque année par l’homme dans l’atmosphère, et 90% du surplus de chaleur dû à l’effet de serre, n’est même pas au programme des discussions de la vingt et unième conférence des parties qui débutera à Paris, le 30 novembre.
les milliers de décideurs et de politiques qui, je l’espère, prendront en cette fin d’année les décisions qui conviennent pour nous assurer un avenir viable sur la Terre ferme de notre planète (…)
l’océan est notre avenir et […] la vie est bleue !
Car, si tout ce que la mer emmagasine était déversé dans l’atmosphère, ce n’est pas 2 °C d’élévation de température que l’on aurait, mais certainement dix fois plus.
Quand j’ai vu arriver sur scène la délégation qui représente les forêts, j’ai pensé que les étudiants avaient inventé quelque chose d’aussi important que l’invention du « peuple souverain » en 1790 pendant la fête de la Fédération !
Article 14 : Les représentants des écosystèmes [Océans, Amazonie] se verront reconnus des compétences de gouvernance pour des actions innovantes et ambitieuses liées au climat.
Je voulais féliciter le gagnant, mais j’ai un doute sur les termes à employer.
Doit-on écrire « C’est un climatomancien hors pair » ou « C’est un climatomanteur hors pair » ?
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La question de l’Océan profond est un vrai casse-tête pour nos climato-catastrophistes : on ne commence à connaître ses températures que depuis le déploiement des bouées Argo, vers 2006 et suivantes.
Donc on NE PEUT PAS PROUVER que les Océans se réchauffent – ce qui pourrait « expliquer » le fait que les températures de surface sont restées stables 17 ans – comme l’a encore rappelé Jean Jouzel une nouvelle fois à ma question posée au CESE le 4 juin matin.
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On ne peut pas le prouver, mais comme on est pas absolument certain qu’ils ne se réchauffent pas, rien n’interdit d’affirmer qu’on a la certitude qu’ils se réchauffent!
C’est comme pour les « affaires » : toute personne (de droite) innocentée par la Justice peut être considérée comme coupable.
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Stéphane FOUCART est visiblement à l’affut de toute publication montrant que la pause des températures n’est qu’une « antienne mensongère » (selon la formule de son alter ego de Libération).
Aujourd’hui la chaleur n’est qu’un artefact des mesures, dans un récent billet (octobre 2014), cette chaleur était tapie dans l’océan profond d’où « elle ne tardera pas à venir nous hanter » comme l’a dit K. Trenberth.
Morceaux choisis l’article de S. FOUCART (ecologie.blog.lemonde.fr – 09 octobre 2013)
« La pause du réchauffement climatique est au climato-sceptique ce que le poumon est au Malade imaginaire.
En réalité, le réchauffement ne s’est nullement arrêté au cours des quinze dernières années et ceux qui affirment le contraire se trompent (ou vous trompent). Démonstration en 5 points. »
Point central de l’argumentaire en 5 points, la reprise de la courbe Balmaseda et al sur l’évolution du contenu thermique des océans (acceptée sans discussion).
Après sa « non démonstration » en 5 points, Stéphane FOUCART conclut ainsi son article :
« La longueur de ce billet illustre bien cette confidence d’un chercheur en sciences du climat : « La raison pour laquelle il y a autant de climato-sceptiques, c’est qu’en matière de changement climatique, il faut dix secondes pour sortir une ânerie, et dix minutes pour expliquer pourquoi c’est une ânerie. »
Je suggère de décerner à M. FOUCART le prix de la suffisance !
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Le Malade imaginaire est en effet bien choisi, Molière a bien dépeint la cuistrerie des climatologues comme celle de Roselyne Bachelot.
Ah, on m’informe que ce n’est pas de cela que voulait dire Foucart.
Tant pis!
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A vrai dire, c’est grâce à Mr Stéphane Foucart que je suis devenu sceptique. C’était en 2009 pendant le ramdam de Copenhague. Le partisianisme et les textes engagés voire péremptoires ne font pas bon ménage avec la science. Pour parler vrai, cela sentait le moisi.
Je souhaite qu’un hommage particulier lui soit rendu et il a tout mon soutien dans cette compétition. Nous tenons challenger qui sera tenir la distance et qui a le potentiel de s’illustrer dans les phases finales.
Encore bravo pour cette compète !!!
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